Depuis toujours, j’ai constaté que les cheveux crépus étaient la cible numéro un des clichés et des rasoirs de toute sorte chez les Haïtiens. Dès mon plus jeune âge, on ne laissait jamais poussé abonnement mes cheveux comme cela aurait dû se faire. On a « laissé nulle place ou la main passe et repasse ». Comme si mes cheveux étaient une toute autre abjecte partie de moi qu’il fallait bannir à tout prix. On me faisait comprendre que mes cheveux étaient sales et que les ôter s’apparenterait au nettoyage ; on se débarrasse de la mauvaise herbe.
De là étant, élève de lycée, cette pratique s’est perpétuée. Aucun élève n’était autorisé à franchir le portail du lycée si ses cheveux n’étaient pas coupés. C’était même un principe cardinal du code disciplinaire. C’est déjà très grave qu’on ait une mauvaise opinion de ces tifs, et donc de soi, ça l’est encore plus quand des institutions comme les écoles érigent ces pratiques (auto) discriminatoires comme principe. L’école qui devrait être un rempart à l’encontre de ces clichés négatifs sur les cheveux crépus les donne, au contraire, droit de cité jusqu’à les élever au rang de discrimination institutionnalisée.
Qu’est-ce qui différencierait les cheveux de l’ongle, d’un bras, etc ? Ne constituent-t-ils pas tous autant qu’ils sont à la parfaite harmonie du corps humain? Ne vous méprenez pas le crâne rasé n’est ni un canon de beauté culturellement haïtien – puisque du XIX au XXe siècle, les hommes et les femmes portaient fièrement leur chevelure crépue – ni une exigence protocolaire. C’est tout simplement une chasse à l’identité noire.
Si pour les hommes le crâne rasé est la règle, pour les filles le défrisage est de mode. Ce sont ces mêmes images qu’on nous a vendues à la télé, il est très rare de voir une artiste exhibée fièrement ces cheveux crépus. Dans l’imaginaire haïtien quelques onces de cheveux sur la tête d’un homme noir passe mal. Cela seulement suffit à se faire traiter de tous les noms. Quant aux dreadlocks, c’est des signes distinctifs à la reconnaissance d’un voyou. Quand on est noir ici, laisser seulement quelques tignasses sur sa tête est passible de toutes formes de condamnations sociales voire pénales. Tout ça en plein XXIe siècle.
Jusqu’à maintenant des institutions qu’on aurait jamais pu soupçonner, garde une politique hostile envers les cheveux crépus. Des écoles, des Universités continuent, jusqu’à nos jours, une pratique discriminatoire envers les cheveux crépus allant même à faire de l’interdiction de ce type capillaire naturel un critère d’accessibilité ou d’admissibilité a leur service.
*Si vous avez été victime d’une discrimination à cause de vos cheveux naturels ou que vous avez une quelconque opinion de ces pratiques n’hésitez pas à nous en faire part dans un commentaire.*
Obed Sanon