Où quand les conséquences géopolitiques vont permettre à une nation non qualifiée, le Danemark, de remporter la compétition.
Avant le dénouement, intéressons-nous aux éliminatoires de ce Championnat d’Europe des Nations 1992, qui a eu lieu en février 1990.
L’Allemagne de l’Ouest et l’Allemagne de l’Est se retrouvent alors dans le même groupe. Pourtant la République Démocratique Allemande vit ses derniers instants.
Alors que le bloc soviétique se disloque, la réunification allemande est actée avec la signature du traité d’unification entre la RFA et la RDA le 31 août 1990. La RDA, en sursis, annonce son retrait logique, quelques semaines avant le début des éliminatoires de l’Euro 1992, au profit d’une équipe d’Allemagne unifiée.
Le 1er match qualificatif est toutefois maintenu, requalifié en match amical, le 12 septembre 1990.
La RDA remportera ce qui sera le dernier match de son histoire face à la Belgique 2-0.
L’équipe disparaitra avec la dissolution de la RDA en octobre 2020.
L’Allemagne réunifiée « Deutsche Fußballnationalmannschaft », avec dans ses rangs quelques joueurs de la #RDA comme Matthias Sammer, se qualifiera ensuite facilement pour l’Euro 1992, en disposant du Pays de Galles, de la Belgique et du Luxembourg.
Côté soviétique, l’équipe de football de l’URSS vit aussi ses derniers instants. Elle parvient toutefois à se qualifier pour l’Euro 1992, en éliminant notamment l’équipe d’Italie.
Après l’effondrement de l’URSS, la Communauté des États indépendants (CEI) est créée le 8 décembre 1991.
Il s’agit d’une entité intergouvernementale regroupant les anciennes républiques soviétiques, désormais indépendantes, pour développer la coopération multilatérale.
Avec la disparition de la Fédération de football d’URSS, une nouvelle fédération est créé sous l’égide de la CEI le 11 janvier 1992 afin que l’équipe d’ex-URSS puisse, sous une nouvelle bannière, terminer la saison en cours et disputer l’Euro.
Pendant ce temps les tensions ethniques font rage dans l’ancienne république fédérative socialiste de Yougoslavie.
Après les indépendances au forceps de la Croatie et de la Slovénie, la région bascule dans la guerre civile en 1991. Fin mai 1992, l’armée serbe bombarde Sarajevo. Cela va conduire le Conseil de sécurité de l’ONU à voter le 30 mai 1992 la résolution 757.
Résolution synonyme d’embargo contre la Yougoslavie et l’empêche notamment de participer à toute compétition sportive, y compris l’Euro 1992.
Dix jours avant l’ouverture de cet Euro, l’équipe nationale yougoslave est donc officiellement exclue du tournoi. C’est le Danemark, deuxième du groupe de la Yougoslavie, qui sera repêché en dernière minute pour la remplacer.
Le Danemark part de très loin.
Le sélectionneur Richard Moller-Nielsen n’avait déjà pas réussi à qualifier l’équipe et les stars de l’époque, Michael Laudrup et Brian Laudrup, boudent la sélection depuis 1990, en désaccord tactique avec l’entraîneur. Autant dire que l’on prévoit le pire pour les Rouges et Blancs qui se retrouvent dans un groupe relevé avec :
• la France, victorieuse de ses 8 matchs en éliminatoires ;
• l’Angleterre, demi-finaliste du Mondial 1990 ;
• le voisin et pays hôte, la Suède.
Les joueurs danois n’étaient pourtant pas encore en vacances, puisque la majorité des joueurs étaient déjà réunis pour disputer un match amical contre la CEI avant l’annonce de l’exclusion de la Yougoslavie.
Les danois commenceront leur Euro de la pire des manières. En 2 matchs ils ne marqueront aucun but, parviendront à obtenir le nul face à l’Angleterre et s’inclineront face au voisin suédois, sur un but de Thomas Brolin.
Alors que la France a son destin en main, les Bleus vont se faire surprendre par un but du danois Lars Elstrup. Avec cette victoire 2-1, les « Danish Boys » se dirigent tout droit en demi-finale de l’Euro, avec la Suède.
Pendant ce temps, dans l’autre groupe, les Pays-Bas et l’Allemagne se qualifient.
A noter que l’équipe de la CEI jouera son dernier match en compétition officielle, avec une sévère défaite face à l’Écosse 3-0.
Le Danemark se retrouve donc à jouer les champions d’Europe en titre, les Pays-Bas de Van Basten, Gullit et Bergkamp. Les hollandais font office de favori de la compétition, vu qu’ils ont écrasé les champions du monde allemand en phase de groupe sur le score de 3-1.
Mais les « Danish Dynamite » vont faire douter les Pays-Bas. Après une ouverture du score rapide de Larsen, les bataves rattraperont leur retard et tout se jouera aux tirs au but. Peter Schmeichel repoussera la tentative de Van Basten et enverra le Danemark en finale.
La dynamique danoise se poursuivra en finale. Face au champion du monde allemand, le peu prolifique milieu de terrain John ‘Faxe’ Jensen ouvrira les hostilités en cadrant sa seule frappe du tournoi. Le milieu n’avait alors marqué avant ce match qu’un seul but en 48 sélections. Kim Vilfort finira le travail pour la victoire 2-0.
Lui qui avait dû quitté ses coéquipiers durant la compétition pour être au chevet de sa fille, atteinte d’une leucémie.
Quelques jours après le sacre sa fille perdait le combat contre la maladie.
Le Danemark, non qualifié pour cet Euro, réalise le plus grand exploit footballistique de son histoire.
Kim Vilfort soulignera d’ailleurs que le Danemark « n’avait pas les meilleurs joueurs, mais sans doute la meilleure équipe ».
Jean Obed Sibrun